Thomas Grégoire, un architecte originaire de Ciney, dans le Condroz namurois, a une idée bien précise en tête : prouver qu’un bâtiment ancien peut atteindre des performances énergétiques élevées, via une rénovation profonde et l’application de techniques modernes. Son choix se porte sur un bâtiment proche du centre-ville. Une maison de rangée bourgeoise, et dans un état très moyen, ce qui n’effraie pas Thomas : « Je voulais un bâtiment qui possède du cachet, mais pas un bâtiment avec trop d’ornements intérieurs ni en trop bon état, car rénover en profondeur afin d’atteindre les standards d’une maison passive, implique de démolir une partie de l’existant. »
Thomas est du genre fonceur. L’après-midi de la visite, il signe le compromis de vente. « C’était un vrai coup de cœur, je n’ai pas hésité malgré l’état du logement et l’importance des travaux. »
Après l’achat en 2011, la réflexion s’organise. L’architecte ressent d’abord le besoin de se documenter et de se former davantage en vue de son projet. La demande de permis est déposée en 2013, et les travaux démarrent quelques mois plus tard, par la démolition des cloisons et l’ouverture d’une grande baie sur l’arrière : « La maison est une deux façades, je souhaitais compléter les deux pièces du rez-de-chaussée par une extension vers le jardin, pour plus de surface habitable et ajouter un bureau. Mais la conséquence était une perte de lumière assombrissant la pièce du milieu ». Un morceau du plancher du 1er étage sera donc recoupé pour apporter de la lumière à la pièce intermédiaire, et une mezzanine verra le jour, destinée au futur salon. De plus, l’extension bénéficie d’une toiture verte, ce qui agrémente la vue vers l’extérieur.
L’isolation du sol nécessite un terrassement : la partie non cavée est creusée et remplie en couches successives : un géotextile, un empierrement isolant de 30 cm en verre expansé, un second géotextile, une dalle de béton de chaux de 15 cm d’épaisseur, une chape de propreté en chaux, et enfin, en finition, un mélange de chaux et de poudre minérale. L’utilisation de la chaux, en plus d’être esthétique, permet au bâtiment d’être perméable à la vapeur et de réguler naturellement l’humidité.
La partie cavée de l’habitation est quant à elle isolée par le dessus. Les anciens planchers et lambourdes sont enlevés. Une dalle de béton est coulée et ancrée dans les murs. Elle est isolée avec 20cm de polyuréthane projeté. L’opération nécessite de rehausser le niveau du sol d’autant, ce que permettent sans problème les hauts plafonds.
Au niveau des parois verticales, les murs bénéficient d’un traitement de choc : les planchers sont désolidarisés du mur de façade arrière par une ossature intermédiaire, sur la hauteur de la maison. Le mur est isolé avec 18 cm de fibre de bois en panneaux. L’architecte y ajoute 18 cm de cellulose insufflée, destinée à isoler l’ossature. Etanchéité à l’air et suppression des ponts thermiques sont assurés.
Les planchers des étages, bénéficient pour leur part de 10 cm d’isolation en fibre de bois dans le gîtage, afin d’atténuer les bruits d’un étage à l’autre. Les planchers, défraîchis par les années, seront remis à neuf via un ponçage efficace.
Le toit, devait être refait, le chevronnage se laissant aller. Thomas fait placer des nouveaux chevrons de 23 cm, ce qui rehausse la toiture par rapport aux maisons voisines. Une originalité nécessaire afin d’assurer une isolation de qualité et préserver de la hauteur sous plafond. En premier lieu, des panneaux de fibres de bois de 6 cm sont fixés au-dessus des chevrons. Dans l’épaisseur de ces derniers, des caissons sont construits, d’une épaisseur totale de 41 cm. Ils sont remplis de cellulose insufflée, possédant un excellent pouvoir isolant et une capacité de déphasage thermique élevée. En finition extérieure, une ardoise naturelle.
Au niveau des installations techniques, le maître d’ouvrage met également le paquet : réseau sanitaire et électricité entièrement refaits, installation d’un Ventilation Mécanique Contrôlée (VMC) dans l’épaisseur des planchers, pompe à chaleur utilisant l’air sortant de la VMC pour le chauffage et l’eau chaude. « Le chauffage se fait par ventilation dans chaque pièce, il est rapide, ce qui convient bien à ce bâtiment très isolé et aux besoins en chauffage très ponctuels. Pour compenser l’air souvent trop sec en hiver, les plafonds des cuisine, salle de bain et buanderie sont plafonnés à la chaux, qui permet une régulation efficace et confortable de l’humidité. »
Aux tests d’étanchéité (mesure des fuites d’air à travers les parois), la maison obtient une valeur de 1 volume par heure, alors que l’objectif était fixé à 0,6. En cause probablement des micro-fuites via les appuis des planchers à l’avant du bâtiment, qui se situent dans les murs mitoyens. « Sur le moment j’ai été un peu déçu vu les efforts entrepris, mais le maximum a été fait. Je n’aurais pu désolidariser les planchers avant des murs mitoyens vu la présence de l’escalier, donc aucun regret. Les premiers tests de chauffe sont d’ailleurs très positifs ! »
Il est vrai qu’en définitive le résultat est remarquable. La maison a été remise au goût du jour, isolée de manière très performante et tous les matériaux utilisés sont naturels, à l’exception de l’isolation du sol de la partie cavée. Un exemple à suivre, assurément.
Type de bâtiment : Maison unifamiliale
Localité : Ciney (Belgique)
Surface du bâtiment : 223 m²
Date de construction initiale : Fin XIX ème
Date de rénovation : Juillet 2013 à …
Consommation énergétique (Kwh/m²/an) : 13 (calcul PHPP)
Architecte : Thomas Grégoire
Entreprise(s) ayant collaboré au projet
Batisomme (murs et toitures, isolation)
Sadecor (chape et finition de sol à la chaux)
Les jardins d’abord (toiture verte)
Vincent Delbrouck (enduits à la chaux)
Isolants utilisés et épaisseur
Toit : Cellulose de papier (41 cm)
Murs : cellulose de papier Isocell (18 cm) + laine de bois (18 cm)
Sol : Sur cave : PUR projeté (20 cm)
Sur terre-plein : mousse de verre expansé (30 cm)